La place des Classes préparatoires dans le mouvement de convergence des Grandes écoles et des Universités

Intervention de Valérie Pécresse devant l’Association des Proviseurs de lycées à Classe préparatoires aux grandes Ecoles (APLCPGE)

Lycée Chaptal
Paris
17 Janvier 2009

Monsieur le Président (Philippe Sémichon, Proviseur du lycée Chaptal)
Mesdames et Messieurs les Proviseurs,

Je vous remercie de votre invitation.

Je suis très heureuse de pouvoir m’adresser à vous, Mesdames et Messieurs les proviseurs, sur ce thème de la place de vos classes préparatoires dans le mouvement de convergence des Grandes écoles et des Université.

C’est un thème qui, vous le savez, me tient particulièrement à cœur et pour lequel je crois pouvoir dire que mon ministère est très mobilisé.

Si l’enseignement supérieur français est un, il est également divers. Dans le respect de cette diversité mon objectif est de le rendre le plus fluide, plus cohérent, pour favoriser sa performance et sa lisibilité aux yeux des étudiants comme des employeurs.

Les classes préparatoires sont les fleurons de notre système de formation initiale, reconnues comme tels par les familles qui les plébiscitent. Elles tirent l’ensemble du système vers le haut et constituent, en particulier en termes de qualité de la formation, un modèle.

L’Université se devait de relever ce défi de la qualité.

De fait, la loi du 10 août 2007, relative aux libertés et aux responsabilités des universités a initié une transformation profonde de notre système d’enseignement supérieur.

Des universités plus fortes, mieux gouvernées, voient aujourd’hui le jour avec un soutien budgétaire de l’Etat inédit que vient encore renforcer le plan de relance.

12 campus vont permettre d’accroître de manière très significative la qualité de vie et de travail des étudiants et des enseignants-chercheurs sur l’ensemble du territoire.

Les établissements sont désormais pleinement engagés dans la réussite de leurs étudiants forts des engagements exceptionnels (730 Millions d’euros en 5 ans) consentis par l’Etat pour atteindre l’objectif de diviser par deux l’échec des étudiants en 1er cycle sur la durée de la mandature.

Les enseignants-chercheurs bénéficient d’une valorisation de leur carrière dans toutes ses dimensions à la fois de recherche et pédagogique.

C’est l’ensemble de notre système universitaire, ses professeurs, ses personnels, ses étudiants qui trouvent aujourd’hui un nouveau souffle grâce à l’engagement du Président de la République.

Cette dynamique retrouvée doit aujourd’hui pouvoir s’articuler de manière plus claire et plus forte avec nos grandes écoles qui constituent l’autre pilier de notre système d’enseignement supérieur.

⇒ Afin de permettre aux étudiants, à chaque étape de leur parcours, de trouver les meilleures conditions de leur réussite et que l’université puisse conduire à la grande école et réciproquement,

⇒ Afin de garantir une équité de traitement entre étudiants des classes préparatoires et des Ecoles et étudiants des universités,

⇒ Afin de favoriser une logique de site universitaire au sens large, qui au sein des PRES notamment, garantira la cohérence de la carte de nos formations, une politique de recherche partagée et la possibilité de mutualiser et d’échanger les forces d’enseignement.

Nous devons promouvoir la convergence des politiques et des pratiques des universités avec celles des classes préparatoires et des Ecoles.

Les Classes préparatoires aux grandes écoles accueillent des étudiants et je considère que leurs professeurs dont plus de 70% sont aujourd’hui titulaires d’une thèse participent pleinement de la formation supérieure des 75 000 jeunes auxquels ils s’adressent.

À ce titre, ces enseignants assument, eux aussi, l’exigence partagée par la nation toute entière d’élever notre niveau global de qualification en permettant à 50 % d’une classe d’âge d’être diplômée de l’enseignement supérieur.

Pour satisfaire cette exigence, le premier défi que nous devons relever et dont le Président de la République a rappelé l’urgence il y un mois à l’Ecole Polytechnique: c’est de permettre à tous les talents de s’exprimer sans discrimination sociale, en ouvrant beaucoup plus largement qu’elles ne le sont aujourd’hui les filières sélectives de l’enseignement supérieur.

Vous le savez, de ce point de vue les classes préparatoires ont un effort à produire. Je sais que cet effort, beaucoup d’entre vous le renouvellent année après année. Mais les objectifs sont ambitieux : 25% de boursiers à la rentrée prochaine dans chacune de vos classes, et 30% en 2010. Il faut donc être plus volontariste encore.

Certes nous mettons en place des dispositifs incitatifs en particulier au travers des Cordées de la Réussite, mais l’atteinte de ces objectifs tient d’abord dans votre détermination à vous, proviseurs et enseignants d’accueillir plus largement de nouveaux profils d’élèves.

C’est à vous d’aller convaincre vos futurs étudiants de vous rejoindre en leur proposant les conditions matérielles et pédagogiques qui leur ouvrent un chemin de réussite.

Et vous êtes sur la bonne voie : cette année nous atteignons 23% de boursiers en moyenne nationale alors même qu’il semble qu’un certain nombre d’élèves de milieux défavorisés n’ont pas sollicité de bourse, cela malgré la réouverture du système au mois de décembre dernier et le rehaussement du plafond.

J’attire votre attention sur ce point : les élèves de CPGE sont parfois éloignés des CROUS, vous devez, dès la rentrée, les sensibiliser à l’existence d’un système de bourses qui leur est naturellement destiné.

Mais il faut aller plus loin, accueillir davantage de boursiers. Certains de vos établissements sont aujourd’hui très loin de l’objectif de 25% dans chaque classe. Vous devez donc être proactifs :

• vous appuyer sur le site de préinscription Admission Post-Sac qui ouvre mardi prochain, pour repérer les élèves boursiers. Les boursiers du scolaire y sont identifiables. Et tous ceux-là ont vocation à être boursier du Sup. Par ailleurs vous aurez, cette année, connaissance des candidats dans votre établissement qui auront reçu du CNOUS un avis positif de bourse de l’enseignement supérieur.

• Mais vous devez aussi vous inscrire dans des réseaux d’établissements comme le proposent les cordées de la Réussite, pour promouvoir vos classes auprès des élèves des quartiers, les aider à franchir les barrières culturelles qui entravent leur ambition.

C’est ensuite à l’Etat de vous aider à les accueillir cette population d’élèves qui a un besoin impératif de logement et d’accompagnement pédagogique. Avec Xavier Darcos nous sommes mobilisés. Nous vous accompagnerons.

La question du logement de ces élèves est cruciale. Le Président de la République a demandé à ce que des Internats d’excellence voient le jour, mais sans attendre, les conventions de vos établissements avec les CROUS pour offrir à vos élèves des espaces réservés doivent être multipliées.

Je souhaite que dans le cadre du plan de relance l’offre de logement étudiant supplémentaire que nous proposerons, vos nouveaux élèves soient prioritaires dans le cadre d’un accueil spécifique.

Vous le savez, j’ai demandé aux Recteurs que chaque lycée entre dans une démarche d’affichage de sa politique en matière d’ouverture sociale en faisant valoir la progression de ses taux de boursiers.

Ces taux seront rendus publics à la fin du mois de mars : non pas dans une démarche de distribution de bons ou de mauvais points mais pour que puissions réfléchir ensemble à la meilleure manière de progresser, lycée par lycée.

Car pour être pertinente et équitable la démarche d’ouverture sociale doit être partagée et globale.

Même si je suis très attachée aux classes préparatoires de proximité dans les lycées de quartiers – j’en ai créés dans les villes moyennes de province comme en banlieue – nos grands lycées, de centre ville, doivent montrer l’exemple, faire la preuve que tous les élèves qui en ont le potentiel peuvent réussir les plus difficiles de nos écoles.

C’est la société française toute entière qui en a besoin.

Votre responsabilité, mesdames et Messieurs le Proviseurs est engagée, Je sais que vous êtes mobilisés. Vous avez d’ailleurs travaillé hier encore sur ce thème dans l’une de vos commissions. Vous tiendrez sans doute à m’en parler dans quelques minutes, mais je veux que vous sachiez, que vous me trouverez à vos côtés pour relever le défi de l’égalité des chances qui constitue le fondement de l’Ecole Républicaine, le gage d’une connaissance largement partagée et la condition d’une élite représentative de la diversité française.

Le rapprochement de nos deux systèmes de formation se construit sur une ouverture sociale partagée par l’ensemble de nos filières mais aussi sur une qualité homogène de l’offre d’enseignement proposée à nos étudiants en tirant, partout et le plus possible, nos exigences vers le haut.

C’est pourquoi j’ai souhaité réformer en profondeur le premier cycle universitaire de formation. Avec le Plan Réussir en Licence, c’est toutes nos universités qui aujourd’hui s’engagent pour accompagner leurs étudiants, renforcer leurs enseignements, les préparer plus efficacement à une poursuite d’études ou à l’insertion professionnelle.

Si l’on veut que des passerelles se mettent en place entre parcours universitaires et parcours dans une Ecole de commerce ou d’ingénieurs, ou Instituts d’Etudes politiques, la convergence doit d’abord être pédagogique et cela dès les premières années après le baccalauréat. La question de la reconnaissance universitaire des acquis de classe préparatoire est aujourd’hui en voie de finalisation grâce au gros travail qui est mené, en application du décret de 2007, par vos équipes et en concertation avec la communauté universitaire pour identifier et valoriser vos enseignements.

Il me semble que la rencontre des deux mondes que sont l’université et les classes prépa est en train d’avoir lieu, Je ne peux que m’en réjouir et ouvrir autant qu’il est possible les espaces de communication et de travail en commun.

C’est d’ailleurs dans cet esprit que j’ai demandé à Christian Philip de me faire des propositions afin de rapprocher nos universités des Grandes écoles.

Une meilleure structuration des PRES, une codiplômation facilitée entre Ecoles et Universités sont des actions concrètes qu’il faudra que nous menions.

Mais une des propositions du rapport suscite particulièrement mon intérêt et je ne doute pas qu’elle vous a également interpellés : il s’agit de la possibilité pour les universités d’ouvrir des classes préparatoires aux grandes écoles.

Quelques mots à ce sujet dont je dis tout de suite qu’il n’a rien de révolutionnaire mais qu’il présente à mes yeux beaucoup de vertus.

D’abord cette proposition ne vise évidemment pas à remettre en cause ou à fragiliser, de quelque manière que ce soit, l’existence des classes préparatoires des lycées et le soutien que leur apporte l’Etat.

Vos classes qui proposent une offre de formation de grande qualité font la preuve de leur attractivité. Dans un contexte démographique morose, elles connaissent, cette année encore, la plus forte progression du nombre d’étudiants avec 2,5% de croissance.

Néanmoins la possibilité pour les universités d’ouvrir des classes préparatoires me paraît présenter beaucoup d’intérêt.

Il n’est dans l’esprit de personne, et certainement pas du mien, d’affaiblir vos formations qui marchent et qui font réussir vos étudiants.

Par ailleurs, dans l’Université, des cycles préparatoires aux écoles existent déjà et depuis longtemps, Je pense en particulier aux ENSI ou aux INP.

Vous travaillez déjà avec les universités pour monter des classes préparatoires dans vos lycées qui engagent des enseignements communs, J’ai en tête une classe de PCSI ouverte à la rentrée dernière au lycée Descartes de Montigny- le-Bretonneux en partenariat avec l’UVSQ.

Aujourd’hui, dans le cadre de leur autonomie, des universités me font connaître leur souhait d’ouvrir des parcours spécifiques de préparation aux écoles.

Il me paraît, pour tout dire, assez légitime que des universités souhaitent organiser en leur sein des parcours qui renforcent leur attractivité, au moment où tendanciellement et toutes choses égales par ailleurs, elles perdent 5% de leurs effectifs sur les 10 prochaines années.

Par ailleurs, nos écoles de commerce et d’ingénieurs ont quelques milliers de places vacantes.

Nous pouvons donc développer de nouvelles voies d’accès à ces écoles dans le cadre d’un premier cycle de formation cohérent et ouvert porté à la fois par les lycées et par les universités.

Universités qui par ailleurs n’ont aucune raison de laisser la part belle aux organismes privés de préparation dont les frais d’inscription me paraissent tout à fait incompatibles avec l’équité républicaine.

Je vous propose donc que nous puissions réfléchir ensemble à cette proposition de Christian Philip.

Je le redis: toutes les structures de formations doivent converger vers l’objectif de permettre à une classe d’âge d’accéder au niveau qualification qui fera la force de notre pays demain, une force faite d’innovation, de technologie, d’intelligence et de culture.

Voilà, Mesdames et Messieurs, les défis que nous partageons. Je sais pouvoir compter sur votre engagement.

Je vous remercie de votre attention.